Début 2015, dans les bureaux d’Apple à San Francisco, le patron d’Uber Travis Kalanick a eu un rendez-vous pour le moins mouvementé avec Tim Cook, PDG de la marque à la pomme. Et pour cause, comme le raconte le New York Times dans une grinçante enquête consacrée à Kalanick, Uber traquait les iPhones de ses utilisateurs au nez et à la barbe d’Apple. Et ce même quand les clients supprimaient l’application. «Dans une quête visant à faire d’Uber un leader dans le monde des transports de particulier, écrit le journal, M. Kalanick a volontairement refusé d’appliquer de nombreuses règles et normes, faisant marche arrière seulement quand il a été attrapé ou mis au pied du mur. Il a méprisé les règles de sécurité et de transport, a mené une offensive contre des concurrents sérieux et a capitalisé sur des lacunes juridiques et des zones grises pour bénéficier d’un avantage commercial.» Pour celui que rien n’arrête, pas même la loi, l’idée de berner Apple est née en 2014, cinq ans après la création d’Uber. La période était difficile pour l’entreprise, puisqu’elle affronte l’émergence de fraudes en Chine, où des chauffeurs mal intentionnés rachetaient des iPhones où l’application avait déjà été installée et créaient de faux comptes pour emmagasiner le plus de courses possible. «Pour mettre fin à cela, les ingénieurs d’Uber ont assigné une identité persistante aux iPhones avec un petit bout de code, une pratique appelée “fingerprinting”. Uber pouvait alors identifier un iPhone et éviter de se faire avoir après qu’on ait supprimé ses données.» Seulement voilà, les règles d’Apple sont très claires, le «fingerprinting» est interdit. Le but de la marque californienne étant d’assurer à ses utilisateurs qu’aucune de leurs données ne resterait sur le téléphone une fois qu’ils en changeraient. Pour outrepasser le règlement, Travis Kalanick a demandé à ses ingénieurs de bloquer les analyses en provenance des bureaux d’Apple, afin que les équipes de Tim Cook ne puissent pas détecter la magouille d’Uber. Lors de la rencontre début 2015, le PDG d’Apple a donc demandé à Kalanick de cesser cette pratique, ou Uber serait retiré de l’App Store. Demande rapidement acceptée. «M. Kalanick était secoué par la réprimande de M. Cook, selon une personne qui l’a vu après la rencontre. Mais seulement momentanément. Après tout, M. Kalanick venait de faire face à Apple, et avait survécu. Il se battra de nouveau tôt ou tard.» Et quand on regarde la liste des innombrables polémiques auxquelles l’application de VTC a survécu, on ne peut qu’y croire.

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